La location saisonnière connaît un fort engouement en France, notamment dans les zones touristiques où elle offre une rentabilité attractive par rapport à la location classique. Dans ce contexte, de nombreux investisseurs font le choix de la société civile immobilière (SCI) pour exploiter un ou plusieurs biens en location courte durée.
Mais attention : le cadre juridique applicable à une SCI qui fait de la location saisonnière est strict, et les obligations nombreuses. Tour d’horizon.
Qu’est-ce que la location saisonnière ? Définition juridique
La location saisonnière désigne un contrat de location conclu pour une durée déterminée, non renouvelable, au profit d’une clientèle de passage n’élisant pas domicile dans les lieux loués.
Cette définition découle de l’article L. 324-1-1 du Code du tourisme, qui précise que la location meublée de tourisme est « le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile, pour une durée maximale de 90 jours consécutifs ».
Pour être considérée comme saisonnière, la location doit remplir les conditions suivantes :
- Durée limitée : le bien est loué pour une courte période, en général moins de 90 jours consécutifs pour un même locataire ;
- Clientèle de passage : le locataire n’élit pas domicile dans le bien (il ne peut pas y établir sa résidence principale) ;
- Meublé : le logement doit être équipé de mobilier suffisant pour permettre la vie courante (cf. décret n°2015-981 du 31 juillet 2015 sur les meublés) ;
- Usage touristique : la location doit s’inscrire dans un objectif de séjour temporaire à des fins de loisirs, tourisme ou déplacements professionnels.
Ce régime diffère ainsi fondamentalement d’une location classique à usage d’habitation principale (loi du 6 juillet 1989).
Quels sont les avantages d’une SCI pour faire de la location saisonnière ?
Créer une SCI pour réaliser de la location saisonnière présente plusieurs avantages patrimoniaux, fiscaux et juridiques, à condition de respecter certaines règles d’exploitation.
1. Meilleure organisation patrimoniale
La SCI permet à plusieurs associés (souvent familiaux) de détenir et gérer un bien immobilier de manière collective, tout en définissant précisément les modalités de gestion et de répartition des revenus dans les statuts.
2. Transmission facilitée
En SCI, il est plus simple de transmettre le patrimoine immobilier à ses enfants ou héritiers via des dons de parts sociales, qui peuvent bénéficier d’une décote sur la valeur en cas d’usufruit/démembrement.
3. Souplesse dans la gestion
La SCI permet de dissocier la détention du bien de son exploitation, ce qui peut être utile pour intégrer un ou plusieurs associés financiers qui ne souhaitent pas intervenir dans la gestion opérationnelle.
4. Choix du régime fiscal adapté
Selon le régime choisi (IR ou IS), la SCI peut optimiser la fiscalité des revenus issus de la location saisonnière, ce que nous détaillerons dans le cadre juridique ci-dessous.
Attention toutefois : une SCI est par défaut une société civile, c’est-à-dire non commerciale. L’exercice d’une activité de location meublée saisonnière peut entraîner un changement de régime fiscal et juridique, voire une requalification en société de type commercial.
SCI et location saisonnière : quel cadre juridique s’applique ?
La location meublée de courte durée constitue, sur le plan juridique, une activité commerciale. Or, la SCI est une société civile, créée pour exercer une activité civile (gestion d’un patrimoine immobilier à usage locatif classique, non meublé).
Que dit la jurisprudence ?
La jurisprudence (Cour de cassation, 6 mars 2012, n°11-10050) a rappelé que l’exercice habituel de la location meublée par une SCI est de nature commerciale, ce qui peut avoir plusieurs conséquences importantes :
| Élément | Conséquence en SCI |
| Nature de l’activité | Peut entraîner la requalification en activité commerciale |
| Régime fiscal | Passage possible à l’impôt sur les sociétés (IS) |
| Risque de nullité | En cas de dépassement de l’objet social, les actes de la SCI peuvent être contestés |
| Responsabilité | La SCI civile ne peut légalement exercer une activité commerciale sauf à basculer vers un statut adapté (SARL de famille, société commerciale, etc.) |
Deux exceptions permettent néanmoins de contourner ce problème :
- L’activité de location saisonnière reste occasionnelle et ne constitue pas l’activité principale de la SCI (cas tolérés par l’administration fiscale) ;
- La SCI opte volontairement pour l’impôt sur les sociétés (IS), ce qui permet de sécuriser l’activité de location meublée et de rester dans un cadre légal cohérent.
Quelles sont les obligations à respecter pour une SCI en location saisonnière ?
Pour exploiter légalement un bien immobilier en location saisonnière via une SCI, plusieurs obligations administratives, fiscales et réglementaires doivent être respectées.
1. Vérification de l’objet social de la SCI
Avant tout, les statuts de la SCI doivent prévoir expressément la possibilité de louer des biens en meublé. Si ce n’est pas le cas, une modification statutaire devra être votée à l’unanimité des associés.
2. Déclaration en mairie ou autorisation préalable
En vertu des articles L. 631-7 et suivants du Code de la construction et de l’habitation, la SCI doit :
- Déclarer l’activité de location meublée touristique en mairie, dans les communes de plus de 200 000 habitants ou zones tendues ;
- Obtenir une autorisation de changement d’usage, notamment en cas de location d’un local précédemment à usage d’habitation principale.
Certaines villes comme Paris, Lyon ou Bordeaux imposent un enregistrement préalable avec un numéro à mentionner dans les annonces (plateformes, site, etc.).
3. Fiscalité et régime d’imposition
Option à l’IR ou à l’IS :
- Une SCI à l’IR n’est pas censée exercer une activité commerciale. Si la location meublée devient habituelle, la société doit basculer à l’IS, volontairement ou par requalification.
- Une SCI à l’IS peut pratiquer de la location meublée sans restriction, mais est soumise à une fiscalité spécifique (impôt sur les bénéfices, distribution des dividendes, etc.).
TVA :
La location saisonnière n’est généralement pas soumise à TVA, sauf si des services para-hôteliers sont proposés (petit-déjeuner, ménage quotidien, accueil personnalisé, etc.).
4. Obligations fiscales déclaratives
Selon le régime choisi, la SCI doit :
- Déclarer ses revenus locatifs via le formulaire 2072 (IR) ou liasse fiscale complète (IS) ;
- Tenir une comptabilité adaptée (plus contraignante à l’IS) ;
- Payer la CFE (cotisation foncière des entreprises) si l’activité est exercée à titre habituel.
5. Normes et sécurité du logement loué
La SCI doit s’assurer que les biens loués :
- Respectent les normes de décence (surface minimale, équipements, sécurité électrique…) ;
- Sont correctement assurés (responsabilité civile propriétaire non-occupant ou multirisque) ;
- Font l’objet, le cas échéant, d’un diagnostic de performance énergétique (DPE) et autres diagnostics obligatoires remis au locataire.
Tableau récapitulatif des obligations selon le régime fiscal de la SCI
| Obligation / régime | SCI à l’IR (activité occasionnelle) | SCI à l’IS (activité habituelle) |
| Autorisation statutaire | Oui | Oui |
| Changement d’usage en mairie | Oui si commune concernée | Oui si commune concernée |
| TVA applicable | Non (sauf services para-hôteliers) | Non (sauf services para-hôteliers) |
| Déclaration fiscale | Formulaire 2072 | Liasse fiscale complète (bilan, compte de résultat…) |
| Comptabilité | Simplifiée | Obligatoire et complète |
| CFE | Parfois (si activité régulière) | Oui systématiquement |

